Ça, c’est la rue où j’habitais à Quito, à flanc de plateau. Le type c’est moi, avec Serge lama (le nom que je lui ai donné, qui ne fait rire personne là-bas). Et là-haut, ce sont les tours du Quito chic. Pratiquement aucune n’est antisismique, bien qu’elles soient construites sur la ligne de faille qui traverse la capitale équatorienne. Au prochain tremblement de Terre, il est clair qu’elles s’effondreront sur les quartiers pauvres en-dessous.
Vivre avec cette épée de Damoclès au-dessus de nos têtes crée une tension intéressante, au sens où la vie quotidienne prend des allures de tragédie potentielle. Malgré ça (moi je pense à cause de ça !) les habitants du quartier sont parmi les plus joyeux et festifs de la ville. Chaque journée est un jour de plus !
C’était un dimanche après-midi pluvieux, sur la montagne qui fait face à Quito. Un match de foot sur un terrain très long mais très étroit, presque une piste d’athlétisme. Dans ces Andes volcaniques, il n’y a pas la place pour construire de vrais terrains… Alors les Équatoriens jouent partout où c’est possible.
Ils portent fièrement des maillots de grands clubs européens. En arrivant, j’ai cru assister à un match Manchester-Barcelone. J’aime la passion que les Sud-Américains mettent dans le football. Rien ne les arrête, ni les conditions météo épouvantables à la saison des pluies ou sous la canicule, ni le peu de place que leur laisse la montagne.
Là-bas, derrière la ligne de touche à l’opposé, c’est le vide. Le flanc de montagne plonge dans la vallée. Et ça remonte de manière aussi abrupte vers le plateau de Quito, noyé dans la brume.
Quand le ballon sort du terrain, la plupart du temps il est perdu, et roule tout en bas. »
Propos recueillis par Marion Quillard