TergalOn me demande souvent si les aventures de ce loser sentimental, qui enchaîne les échecs amoureux voire sexuels, sont autobiographiques. La question est insultante. Mais assez juste. Cette quête calamiteuse de l’âme sœur sent le vécu. Personnellement je vais beaucoup mieux.
Les trois premiers tomes racontent en courts épisodes une rupture, et les tentatives de d’autres conquêtes féminines aux moyens de stratégies que je ne conseille à personne, Ainsi que les relations tortueuses avec les soit-disant amis.

Les quatre tomes suivants parlent de l’enfance de Jean-Claude jusqu’à l’adolescence, de la découverte du sexe, et des personnages haut en couleur de la famille. Et on comprend mieux ses difficultés d’adulte ! A partir du tome 9, ce sont de longues histoires d’un album complet. Où Jean-Claude nous prouve que perdre, rater, foirer, est un art qui peut confiner au sublime.

Prix de l’humour Angoulême 1998
(éd. Fluide Glacial)


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"La chanson de Jean-Claude", par Georges Valentin.

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Tergal, notre sauveur en doudoune
Magie de l'auto-dérision qui guérit de toute les catastrophes sentimentales, et redonne leur dignité aux naufragés de la séduction

Quand on me parle en ricanant de Jean-Claude Tergal comme d'un imbécile lourdaud, doté d'une maladresse congénitale avec les filles et habillé comme un sac, je réponds en souriant, lèvres gercées, que Jean-Claude, c'est moi. Merci bien. Au delà du plaisir de constater le malaise incrédule de mon interlocuteur, j' avoue que c'est un peu vrai. Même la doudoune misérable, je l'ai portée. Et pour répondre définitivement ici à l'incessante question: oui, Jean-Claude Tergal, c'est du vécu.

J'ai dit mon goût du vrai, il va jusqu'aux histoires sentimentales (ratées). Pour les raconter, il faut les avoir vécues. Sinon, on sent la contrefaçon, et le point de vue reste extérieur. Ce n'est pas sincère. Le lecteur, qui n'est pas le dernier des imbéciles, lui, le flaire tout de suite.

Donc, Jean-Claude Tergal, c'est moi. Oui et non. C'est nous plutôt. Nous, les besogneux de la drague, les balbutiant, les jambes molles, rouges au front et coeur battant devant cet être inouï: la fille. Nous les recalés de la séduction (et nous sommes un paquet) qui haïssons en secret le bellâtre gominé, celui qui nous pique toutes les gonzesses sous le nez dans ces "boums" cuisantes pour l'orgueil, cruelles pour les faibles; nous qui nous en retournons chez nos mères, à minuit passé, coeur meurtri et bite sous le bras.

Avec Jean-Claude Tergal, j'ai voulu me faire le chantre de ces mal aimés. Une immense majorité en fait, qui a un jour ou l'autre connu l'humiliation infligé par ce monstre d'inhumanité: la gonzesse. (Pardon les filles, mais de l'extérieur, quand on ne connait pas bien et qu'on a de l'acné juvénile, c'est l'impression que ça fait). Bien sûr, j'ai fait partie de ce lot d'inconsolables, je le clame sans honte, maintenant que j'ai pu recueillir le témoignage de tous ces lecteurs, me confiant soulagé et sous le manteau: "Jean-Claude c'est moi aussi". Ou (hypocritement) "c'est un copain à moi".

Elle me quitte, connard
TergalOr donc comment est né Jean-Claude ? Je veux ici solennellement en désigner la responsable, qui se cache misérablement quelque part sur le territoire français, je ne veux même pas savoir où, et vit actuellement entourée de trois enfants aux joues rebondies, au bras d'un époux aimant qui la comble probablement (je le hais sans le connaître). Elle feint de m'ignorer avec un don d'actrice remarquable, et présente tous les symptômes de quelqu'un qui m'aurait totalement oublié. C'est à s'y méprendre. Apparemment inconsciente des dégâts considérables occasionnés. Quel talent!

En bref, les apparitions-disparitions de cette femme feu-follet dans ma vie, sa désinvolture amoureuse à mon égard à une époque d'hyper fragilité affective (époque qui a commencé avec ma naissance et finira avec ma mort, peut-être) m'ont inspiré les grandes lignes du personnage de Jean-Claude. En cela, je suis reconnaissant à la diablesse: elle fit mon infortune conjugale, mais ma fortune littéraire (bien modeste compensation). Et donc Jean-Claude me sauva: je transférai sur ses épaules toute la charge affective, y mit un brin de dérision, un poil de caricature, le tout enveloppé d'une doudoune pneumatique, qui fit de lui le bibendum de ces dames.

Lui aussi, brave Jean-Claude, comme le fut Raymond, était porteur d'un message pour moi: quelque soit la catastrophe sentimentale, un pas de côté, un regard décalé sur nous même, et le dérisoire nous apparait. Le cataclysme planétaire d'une fille qui nous quitte n'est qu'un banal accident de la déroute. On y survit. Sur la couverture du tome 1, Jean-Claude est seul au lit, chapeau pointu et confettis, face à cet autre message: "je te quitte connard". Le titre du livre: "Jean-Claude Tergal garde le moral". Le programme de toute une vie.

Enfance revisitée
Plus tard, il me sembla que pour mieux comprendre Jean-Claude et son inégalable capacité à échouer, il nous manquait son enfance. Comme chez tout être humain, les racines de la personnalité y puise directement leur sève. Et il m'apparut enthousiasmant de reconstituer la totalité d'un personnage (qui habituellement n'a pas d'âge) depuis la naissance, et pourquoi pas aussi le voir vieillir plus tard. Le personnage cesse donc d'être une figure de papier, saisie à un moment de sa vie fictivement sans fin, pour vivre sous nos yeux, toute une existence évolutive qui lui donne sa chair. Et c'est dans l'enfance qu'on trouvera les évènements fondateurs du mythe Jean-claudien.

Ce faisant, je n'échappe pas à cette revisite du passé, car pour être justes, ces évènements, il faudra bien que je les ai connus moi-même. Problème: comment échapper à la complaisance et l'auto-attendrissement qui ne concerne que moi ? C'est le piège des récits autobiographiques où tout nous est livré en vrac, sans ce travail d'auteur qui consiste à élaguer, remettre en scène, rendre communicable la matière vécue. A l'arrivée, ce qui m'intéresse c'est que chacun y retrouve son enfance, plus ou moins, et en même temps qu'elle donne un éclairage singulier à ce que vivra Jean-Claude plus tard.

Mais, même réinventés, les livres parlent de nous. Ces tomes d'enfance jettent aussi un éclairage sur cet enfant perdu que je fus. Une page, la dernière du tome 6 des "portraits de famille" montre même la puissance de guérison des histoires. Jean-Claude enfant y remonte la chaine familiale jusqu'à la grand-mère (qu'il fait revivre) et s'aperçoit comment de mère en fille, personne dans cette famille n'a jamais su dire "je t'aime" à ses enfants. Puis il demande à son propre fils (qui n'existe pas encore) de lui rappeler tout çà quand il vivra, pour interrompre la grande chaîne de la malédiction. Magie réparatrice de la fiction...

Mais c'est aussi...
Le personnage de Jean-Claude Tergal a également pris forme sous différents aspects :

---> En film...
---> Au théâtre...
---> En blog... (on n'arrête pas le progrès !)